Chine: Arnaud de La Grange – Le Figaro
Les mystères de Chongqing
Par Arnaud de la Grange le 20 mars 2012
Par ailleurs, ces jours derniers, les autorités centrales ont semblé craindre une mobilisation « pro-Bo Xilai ». Les sites Internet phares de la « Nouvelle Gauche », dont Bo Xilai s’était fait le héraut, ont ainsi été un temps inaccessibles. Il s’agit notamment de www.maoflag.net et de Wu you zhixiang (Utopia, www.wyzxsx.com). Ils sont aujourd’hui de nouveau ouverts. Ses sites font notamment l’apologie du « modèle de Chongqing », qui vient de prendre une torpille sous la ligne de flottaison. Bo Xilai était le seul homme politique chinois à avoir cherché, de manière très médiatique, à se construire une base populaire. Et sa dénonciation de la corruption et des inégalités sociales recevaient un écho certain. Cette rupture avec la traditionnelle façon de faire au sein du PCC, ce non-respect des codes, est en partie la cause de sa chute.
La presse et des sites de Hong Kong rapportent aussi que la situation serait très tendue au sommet du PCC, entre le groupe des protégés de l’ancien président Jiang Zemin et le camp du président Hu Jintao. Un violent différend aurait ainsi opposé le ministre de la Sécurité publique Zhou Yongkang (qui fait partie du premier groupe) et le Premier ministre Wen Jiabao, au sujet du sort de Bo Xilai.
Signe des temps, en tout cas, une campagne de “dérougisation” serait en cours à Chongqing. Et les séances de “chansons rouges”, animées chaque jour par des retraités au parc Jingshan à Pékin (juste au Nord de la Cité interdite), sont désormais annulées…
Il dénonce aussi l’adhésion au Parti par unique intérêt, par carriérisme. « Certaines personnes entrent aujourd’hui au Parti non parce qu’elles croient au marxisme ou veulent se consacrer au socialisme aux couleurs de la Chine, ou se battre jusqu’au bout pour la cause communiste, mais parce que devenir cadre leur procure des avantages personnels » dit-il dans un autre extrait cité par l’AFP. « Si la pensée des membres et des cadres du Parti n’est pas pure, leurs idéaux ne peuvent pas être solides et leur positionnement politique peut aisément vaciller ». Il faut « maintenir la pureté idéologique du parti » et « expurger avec détermination des rangs du Parti les éléments corrompus et dégénérés incurables ».
Sur le Web chinois circulent aussi des informations (ou rumeurs…) disant que Xi Jinping aurait estimé que tous les cadres de haut rang en Chine devraient pouvoir publier leur patrimoine, et que lui était prêt à le faire. Mais que sa proposition aurait reçu 99% d’avis négatifs. Sujet très commenté par les internautes.
L’article est titré : “Une majorité de l’opinion appelle à des réformes plus profondes”. L’étude a été menée sur un échantillon de 1010 personnes, précise le journal (photo AFP)
Quelques éléments :
– 80.9 % des personnes interrogées estiment que les réformes engagées ont été couronnées de succès. Mais 93,9% appellent les autorités à approndir ces réformes, tant sur le plan “politique, économique que social”.
– 62,5% des sondés estiment que les “groupes d’intérêt” (formule qui désigne des clans ou regroupements soudés par des intérêts à la fois économiques et politiques) sont le principal obstacle aux réformes. Les caciques des entreprises d’Etat sont particulièrement visés, estiment des commentateurs universitaires dans l’article.
– la moitié des sondés pensent que l’approndissement des réformes ne met pas en danger la stabilité.Quelque 79% d’entre eux sont pour des réformes par étapes. Mais “beaucoup de jeunes interrogés désirent des changements plus radicaux” est-il encore écrit.
– Enfin, à la question sur l’adoption d’un modèle de démocratie à l’occidentale, 29% rejettent l’idée, 47,9% n’y sont pas opposés mais jugent l’idée peu réaliste, et 15,7% soutiennent cette option. Soit tout de même 63,6% que l’idée ne rebute pas.
C’est au Ningxia, dans cette région autonome créée pour les musulmans Huis, quele meilleur vin de Chine est concocté. Au Nord, dans la longue plaine alluviale du Fleuve jaune. C’est du moins ce qu’a statué Robert Parker, grand gourou de la dégustation mondiale. Il vient de décerner sa meilleure note jamais donnée à un vin chinois (86 sur 100, à égalité avec Grace Vineyards) à une cuvée de Silver Heights.
L’histoire est belle. Les grands-parents d’Emma Gao, originaires du Shaanxi, arrivent au Ningxia en 1949, tous deux comme soldats dans l’Armée rouge. Ils font souche ici, comme cadres du Parti. Le père d’Emma, lui, gère une exploitation d’Etat, alignant 300 hectares de vigne. A ses heures perdues, il fait du vin dans des vases en céramique. «Il a vu que mes études de comptabilité ne me satisfaisait pas du tout, raconte-t-elle, alors il a décide de me donner une seconde chance». Il envoie sa fille se former en France. Une belle vision de la part d’un humble cadre de l’hinterland chinois, qui a su imaginer quelle folie du vin allait un jour saisir la Chine.
Emma passe d’abord quatre mois à Pékin pour apprendre les bases du français, puis c’est le grand départ. Quatre ans de formation, qui commencent au Lycée viticole d’Orange. Puis, trois années à la Faculté d’oenologie de Bordeaux, avec en outre un DESS de commerce de vins et spiritueux. Au passage, elle rencontre son mari Thierry, qui oeuvre dans un grand crû du Bordelais. Ensuite, elle travaille quelque temps dans l’Armagnac. Retour en Chine. Elle rejoint un vignoble du Xinjiang, les Champs d’Or. Puis, gagne Shanghai où elle travaille pour de gros importateurs, dont Torres. «Tous les ans, je rentrais à la maison faire du vin. On a commencé avec 10 barriques pour la famille et les amis» raconte-t-elle. En 2009, elle s’y consacre à plein temps.
Fin 2011, c’est la consécration avec la reconnaissance de Parker. Mais Silver Heights est aussi sacré «meilleur vin de Chine» au China Wine Challenge. Aujourd’hui, Silver Heights ne produit que 20 000 bouteilles par an, mais les Gao viennent d’acheter 200 hectares de terre. Truffés de cailloux, pour l’heure, mais « vierges, jamais pollués par des produits chimiques, et sous les monts Helan qui arrêtent les vents froids venus du Nord, du désert de Gobi. Le terroir, ici, parle de lui-même». Emma énumère les avantages. L’ensoleillement, le grand écart de température entre le jour et la nuit, l’air sec qui permet de faire un vin bio, puisqu’il n’y a pas de maladies. L’inconvénient principal, c’est la rigueur de l’hiver, qui force à enterrer la vigne. «On en casse environ 10% à chaque fois», dit-elle.
Quand Pékin filtre les invités de Merkel
Par Arnaud de la Grange le 3 février 2012
«Le XVIIIe congrès du Parti est en préparation, nous devons maintenir la stabilité, nous ne pouvons pas autoriser que des voix différentes s’élèvent en ce moment»ont-ils déclaré. C’est dommage pour la chancelière. Car ceux qui ont eu la chance de rencontrer Mo connaissent un homme aussi charmant que passionnant, calme et pondéré. Mais le fait d’avoir été l’un des défenseurs du prix Nobel de la Paix Liu Xiaobo n’a pas rendu plus simple sa vie quotidienne… Plus tôt dans la journée, lors d’une conférence de presse, la chancelière allemande avait indiqué avoir eu un«dialogue franc» avec ses interlocuteurs chinois sur le sujet des droits de l’homme.Peut-être a-t-elle peu goûté de voir ses invités ainsi censurés, et aura-t-elle envie d’y revenir ?
(Crédit photo : International Observatory For Lawyers)
Dans l’autre sens, la métaphore est canine. Les criquets seraient ainsi une riposte aux propos châtiés d’unprofesseur d’université pékinois, ayant traité les Hongkongais de « chiens », de« bâtards » et de « traîtres ». Sur la télévision en ligne Vodone, Kong Qingdong a ainsi affirmé que les habitants de Hong Kong « servent de chiens aux colonialistes britanniques », estimant que « ce sont des chiens, pas des êtres humains ». Son ire faisait suite à une vidéo amateur qui a fait le tour d’Internet, et montrant une Hongkongaise reprochant à des continentaux de manger dans le métro, alors que c’est interdit. L’universitaire, qui se veut un descendant de Confucius, est il est vrai connu pour son tropisme très nationaliste et ses affirmations tout en délicatesse et nuances. Il y a quelques mois, il avait traité de « traîtres » les journaux du sud de la Chine, plus libéraux.
Il y a quelques mois, certains de ses conseillers suggéraient à Hollande d’aller prendre le pouls de la grande puissance émergente et 2e économie mondiale. Mais il ne s’est apparemment pas montré intéressé. Peut-être échaudé par les déboires de son ex-moitié, Ségolène Royal, qui continue à traîner sa « bravitude » comme un boulet. On a toutefois appris ce week-end que le candidat socialiste envoyait l’ancien Premier ministre Laurent Fabius en mission pour lui en Chine et au Japon, fin février.
Le prix, lui, n’a rien de prolétarien. Le RedPad coûte 9 999 yuans, plus de 1 220 euros, soit à peu près le double du produit capitaliste d’Apple. La cherté s’expliquerait par les applications. Tollé sur le Web chinois, les internautes dénonçant la gabegie des fonds publics. Et affirmant que le fabricant, un ancien du Quotidien du peuple, serait très lié au puissant ministère de l’Information.
L’Histoire serait généreuse en exemples. New York 1930, Chicago 1974, Kuala Lumpur 1997 et Dubaï 2010. La dernière illustration de ce phénomène de folle élévation précédant la chute serait la tour Burj Khalifa, dont l’arrogante altitude de 800 mètres n’a pas empêché l’émirat d’être vilainement rattrapé par la crise financière. Point de superstition derrière tout cela, mais une simple mécanique économique. Ces grands immeubles sont souvent le reflet d’une bulle immobilière, et l’éclatement est inévitable. Sans prévoir le chaos pour demain en Inde et en Chine, la banque Barclays voit une possible «correction économique» pour les deux géants d’Asie dans les cinq prochaines années.
L’homme qui a dessiné le timbre, Chen Shaohua, a défendu son œuvre, estimant qu’elle pouvait être interprétée comme un symbole de la « confiance croissante » de la Chine. Il fallait pour ce cela un dragon « dur » et « puissant ». Selon le quotidien officiel Global Times, le dessin est inspiré de « vêtements du dragon » portés par les empereurs de la dynastie Qing.